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Le blog de reve-de-lune1982

chapitre 2

Comment retrouver son innocence

La fée avait finalement réintégré la prairie Montjardin. Mais elle ne se promenait plus en habits de fête. Elle les portait toujours mais elle s’était affublée d’une blouse informe qui la cachait entièrement tête comprise. Elle marchait le dos rond et les yeux baissés vers le sol. Elle ignorait le monde qui l’entourait. Elle avait toujours envie de vomir aussi ne mangeait-elle pratiquement plus. Un grain de raisin et un peu d’eau la contentait. Elle ne se lavait plus. Les habitants de Montjardin devinaient sa présence plus qu’ils ne la voyaient. Plus de danse, plus de chants, plus de bonjours joyeux : le silence. Parfois l’un d’eux la trouvait enfouie sous les hautes herbes, enroulée dans son infâme vêtement. Elle ne faisait plus confiance à personne. Comment retrouver son innocence après avoir été bafouée à ce point. Elle préférait se cacher et garder le silence.

 

 

Petit Renard, ami de Licorne, avait bien grandi. Son pelage roux parsemé de taches blanches était devenu abondant et doux. Son regard perçant d’intelligence regardait le monde avec bienveillance. De loin, il suivait Petite Fée et la voyait s’enfoncer dans la mort. Il se résolut à rencontrer Licorne pour lui demander conseil. Licorne rappela le conseil des Sages et avec Renard mit au point une stratégie : faire le rappel des fées de tout le voisinage et les amener à faire connaissance de la Petite Fée de Montjardin.

Mais avant cette rencontre il avait été dévolu à Renard d’apprivoiser Petite Fée. Renard tout rougissant de cet honneur recommença donc à la suivre.

Imperceptiblement, jour après jour, il se rapprocha d’elle. Il sema aux alentours de sa cachette des fruits brillants, appétissants et juteux ; des graines d’amandes, de noix, de noisettes ; de succulentes fraises des bois cachées sous les hautes herbes. Une nuit, il eut même la hardiesse de la toucher d’une patte légère, tout de caresse et de douceur. Au matin, lorsqu’elle ouvrit les yeux, Petite Fée perçut une petite chaleur qui réchauffait son corps douloureux. Elle regarda aux alentours, et vit enfin tous ces fruits et ces graines amoncelées autour d’elle. Une belle poire était posée à ses pieds. Elle la prit, mordit dedans et ce fut un éclatement de saveurs et de jus sucré. En même temps elle aperçut à travers les hautes herbes deux petites oreilles blanches et duveteuses. Elle s’apprêtait à s’enfuir de peur lorsqu’une douce voix lui dit :

  • N’ai pas peur de moi. Je suis là juste pour t’aider à retrouver la vie.
  • Qu’est-ce que tu me racontes je ne veux pas retrouver la vie. Je veux qu’on me laisse mourir tranquille.
  • Tu ne peux plus mourir maintenant que tu as mangé cette poire. Elle est magique. Ne sens-tu pas dans ton corps cette lumière qui arrive ?
  • Magique ! magique ! Peuh ! Non je ne sens rien. Va-t’en. Tu n’as rien à faire ici.  Retourne dans ton terrier.

Renard avait conscience qu’une grande colère habitait Petite Fée. Pour l’instant il ne pouvait rien faire de plus dans le monde visible. Il s’éloigna d’elle restant tout proche mais invisible.

Toutes les nuits suivantes, il revint et la toucha à nouveau d’une patte légère et lumineuse. Il attendait, avec patience, le réveil de la conscience de Petite Fée. Il continua, aussi, à déposer une poire couleur soleil à ses pieds. Mais, pendant plusieurs jours, elle l’écrasa avec violence. Une nuit, en plus de son rituel, Renard déposa un petit miroir.

Ce matin-là, au réveil, Petite Fée se sentit bizarre. Des frémissements, des vibrations légères traversaient son corps. Elle pensa à Renard. Elle eut l’envie d’être dans ses bras et de caresser sa douce toison. Elle aperçut la poire et le petit miroir. Pourquoi un miroir ? Elle le prit et se regarda…et…poussa un cri. Qui était ce visage si laid, grimaçant, noir de boue et de suie.  Elle approcha sa main du miroir et se rendit compte que c’était son visage qu’elle voyait. Elle se mit à sangloter. Renard s’approcha :

  • Ce que tu vois n’est que la surface de toi-même. L’intérieur est tellement beau, mais tu l’as oublié.
  • Comment peux-tu savoir que mon intérieur est beau ?
  • Parce que nous sommes tous beaux. Nous sommes tous capables de créer de la joie et de l’amour. Tu l’étais autrefois. Maintenant c’est juste enfoui sous des couches de peur. Je peux t’aider, si tu veux laisser à nouveau éclater ta beauté.

Petite Fée regardait Renard et sentait un amour naitre en elle.

  • Je voudrais te caresser mais avant j’aimerais me laver. Mais j’ai peur d’aller à la source toute seule ; peux-tu m’accompagner ?
  • Bien sûr. Tu peux même t’appuyer sur moi.

Il se redressa. Et Petite Fée put alors voir sa magnificence. Elle s’accrocha aux poils de son torse, se leva et avec son aide rejoignit la source.

Pendant que Renard surveillait les alentours, elle se déshabilla et entra dans l’eau fraiche. Puis, elle se mit sous une petite cascade et laissa l’eau la purifier et enlever toute la boue qui s’était incrustée dans son corps.

Elle lava aussi ses vêtements et pendant qu’ils séchaient, elle s’allongea sur la terre chauffée par le soleil. Une légère brise la caressait.

L’eau, le feu du soleil, la douceur de la terre, le vent, réveillaient en elle des perceptions oubliées. Son corps s’abandonnait enfin. Il puisait dans la terre et dans le feu du soleil des énergies qui faisait à nouveau circuler le sang dans ses veines. Sa respiration redevenait ample et les parfums de fleurs, de terre, de champignons s’immisçaient dans toutes ses cellules. Des bulles pétillantes éclataient dans sa tête, des fourmillements, des picotements de joie lui signalaient que la vie revenait. Et, enfin, une faim immense se manifesta. Une faim de vie, de joie, de rencontre. Sans hâte, elle se leva, s’habilla de ses habits de fête, s’approcha de Renard qui lui tendit une poire jaune couleur soleil.

Au cours de la journée et des jours suivants, Renard l’accompagna dans sa redécouverte de son territoire et du petit peuple de la Prairie Montjardin.

Pendant ce temps les Fées des territoires voisins s’étaient rassemblées et avaient organisées une fête dans la forêt avec Licorne et les peuples de la forêt.

Un soir de pleine lune, Renard amena Petite Fée à leur rencontre.

La nuit résonna de leurs chants, de leurs rires et de leurs danses et porta loin jusqu’aux in-humains-es une énergie que seuls-es certains-es d’entre eux-elles pouvaient percevoir et associer à leur fête

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