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Le blog de reve-de-lune1982

Chapitre 1

 

 

Il était une fois, une petite fée toute joyeuse qui se promenait dans l’immense prairie de Montjardin.

Cheveux au vent, des rubans multicolores papillonnaient autour de sa tête. Bouille et yeux ronds et lumineux s’ouvraient sur le monde. Sa robe était de lumière rose, ses socquettes de vert émeraude et ses chaussures de bleu profond. Une fleur parmi les fleurs, elle sautait de rocher en rocher, chantait, dansait, riait aux éclats, coassait, tirait la langue à tout le petit peuple de la prairie qui l’acclamait et jouait avec elle. Elle s’enivrait de la beauté, de la profusion, de la différence, de la senteur qui embaumait ce vaste espace connu d’elle seule. En effet, cette prairie surplombait une vallée des-humains mais inaccessible pour eux.

Ce jour-là, elle était d’humeur particulièrement curieuse et intrépide. Elle avait décidé d’élargir son cercle de connaissance et d’aller où elle ne s’était encore jamais aventurée : à l’orée de la forêt.

Le soleil était à peine levé, elle avait donc devant elle, une longue et belle journée pour cette escapade. Dans un petit sac à dos vert pomme, elle avait entassé quelques noix, noisettes, et autres amandes et un peu d’eau dans une gourde (elle aurait toujours l’occasion de la remplir aux sources de la prairie) pour étancher sa soif et apaiser sa faim.

Elle marchait et gambadait, donc, sans fatigue, depuis environ quatre heures déjà, le long du sentier où rochers et douce terre la portaient. Mais l’orée de la forêt étant encore éloignée elle opta pour une petite pause sieste. Elle s’allongea sur une couche de fleurs fanées gorgées de parfums et s’endormit bienheureuse.

Elle s’éveilla toute guillerette et reprit sa marche sans faiblir. Elle ne s’était pas rendu compte que le jour avait commencé à baisser car sa sieste avait été longue. Deux heures passèrent. Elle voyait à présent le cercle de la prairie délimité par les arbres. Toute joyeuse d’être presque arrivée elle s’élança sans précaution vers le premier arbre à sa portée. Vlan…une griffe s’accrocha à son poignet et elle fut poussée dans la forêt et attirée vers une grotte sombre.

Elle ne voyait pas ce qui la retenait. Elle sentait simplement une chaleur dans la griffe et une montagne molle et chaude au-dessus d’elle. Elle essayait de se libérer mais plus elle cherchait à se dégager plus la griffe se resserrait.  Elle hurlait, criait pour prévenir ses amis-es de la prairie mais elle se sentait attirée de plus en plus profondément dans la grotte et plus personne ne pouvait l’entendre.

Il faisait nuit noire. La chose s’était arrêtée. Collée contre elle, la petite fée ne pouvait plus respirer tant l’odeur était nauséabonde. De cette montagne molle coulait un liquide chaud et visqueux et imprégnait ses beaux vêtements de fête. Avec ce liquide des genres de poils lui entraient par la bouche, par le nez. Elle étouffait, elle voulait vomir mais trop serrée contre la chose elle était obligée d’avaler cette purée infâme. Sa vie partait de tous ses pores, sa lumière s’éteignait, une peur primale lui serrait le ventre, envahissait tout son corps.  Chaque muscle se rétractait, les moindres espaces de sa peau la piquait, la démangeait. Puis, ce fut le trou noir.

Un jour. Deux jours. Trois jours. Les habitants de la prairie habitués à la présence quotidienne de la fée s’inquiétaient. Tous se mirent à sa recherche. Dans les terriers, les mares, les ruisseaux, les rochers, les petits arbustes, et chaque brin d’herbe fut soulevé.

Ils ne se découragèrent pas. Ils n’abandonnèrent pas leur recherche. Pendant des années, la première activité que faisaient les animaux diurnes au lever du soleil ou à la tombée de nuit pour les animaux nocturnes, c’était de fouiller chaque endroit de leur territoire. Arriva un temps où ils exécutèrent leur rituel, avec conscience, avec passion, mais oublièrent pourquoi ils le faisaient. La fée avait complètement disparu de leur mémoire. Elle était morte à jamais.

Un jour, une licorne blessée vint à passer par la petite prairie. Les Animauxthérapeutes de ce comté étaient connus au-delà de leur territoire et célèbres pour leur succès de guérison. Elle demanda des nouvelles de la fée, son amie de toujours.

Les animaux présents se regardèrent étonnés.

  • Quelle fée ? Quelle amie ?
  • Mais si, vous vous souvenez bien de cette petite fée si joyeuse.
  • Ben Non, désolés nous n’en avons jamais entendu parler.
  • Comment vous n’en avez jamais entendu parler ? Je suis déjà venue me faire soigner chez vous et c’est là que je l’ai rencontrée. Et vous étiez si heureux de sa présence. Vous n’arrêtiez pas d’en faire des louanges.

Les animaux étaient mal à l’aise de devoir contrarier la licorne qui était une licorne sage et très âgée malgré son poil luisant et ses yeux lumineux.

  • Peut-être existait-elle autrefois mais il y a des années que nous ne l’avons pas vue et c’est certainement pour ça que nous l’avons oubliée.

 Un petit renard roux, qui, entendant la discussion, s’était faufilé au milieu du cercle, les interrompit :

  •  Mais si, moi je m’en souviens bien. Elle chantait et elle dansait tout le temps. Enfin, je veux dire que c’est mes parents qui m’en ont parlé. Ils le tiennent de leurs parents, qui eux le tiennent de leurs parents. Enfin, je veux dire depuis plus de six générations c’est une tradition dans notre famille d’honorer sa mémoire tous les matins, rectifia tout penaud le petit renard.
  •  Disent aussi qu’elle était sacrément belle, et intelligente, et douce et gentille, enfin, disent qu’elle avait toutes les qualités. Ça me gave un peu ça. Y faut j’lui ressemble. Un peu difficile, non ? Mais ça fait des années qu’elle est plus là. Un jour, pfutt, elle a disparu. Y s’en ont pleuré tout leur soul.
  • Merci petit renard. Toi aussi tu es tout beau et tout doux et tout gentil. Viens ici que je t’embrasse. La licorne prit le renard dans ses bras et posa deux gros bisous sur ses joues dorées qui virèrent au rouge grenat. (Pendant des générations de renards on raconta qu’un petit renard roux avait été embrassé par une sage licorne et qu’ils étaient devenus amis pour la vie !)
  • Réfléchissons un peu dit la licorne. Si vous ne l’avez pas trouvée dans la prairie c’est qu’elle est partie ailleurs. Et ailleurs, ici, c’est la forêt.
  • Tous s’écrièrent : la quoi ?
  • Ben, la forêt. Vous voyez bien, à l’horizon, vous êtes entourés d’arbres.
  • Mais… à l’horizon, y a que le ciel et le soleil. Y'a rien d’autre.
  •  Qu’est-ce qu’un arbre ? Qu’est-ce qu’une forêt ? Comment c’est fait ? ça se mange ? C’est dangereux ?

Les questions tombaient sur la pauvre licorne qui n’en croyait pas ses oreilles.

  • Je vous raconterai cela une prochaine fois. Nous n’avons pas de temps à perdre si nous voulons retrouver la petite fée.
  •  Elle était tellement espiègle et ouverte à tout peut-être a-t-elle voulu voir ce qui se passait là-bas et qu’elle s’est perdue. Ou bien elle a été blessée et n’a pas pu revenir. Ecouter, j’ai ouïe dire, qu’il y avait eu, il y a bien longtemps, un ogre dans une grotte qui mangeait l’innocence des enfants.
  • Oooh ! l’innocence des enfants ? Mais ce n’était pas une enfant, c’était une fée. Comment aurait-il pu l’attraper ?
  • Les ogres ont plus d’un tour dans leur sac. Ils ont déjà la force physique. La fée pour l’ogre c’est comme pour nous attraper une mouche. Peut-être aussi que dans leur enfance ont leur a fait tellement de mal qu’il n’y a plus d’amour ni de compassion dans leur cœur. S’ils cherchent à manger l’innocence c’est qu’on leur a mangé la leur. Ils ne ressentent plus le mal qu’ils font aux enfants.
  •  Dès que je pourrai marcher, je repartirai et je rassemblerai toutes mes amies licornes et tous les autres animaux qui habitent la forêt. Nous ferons une battue dans tous nos territoires.

 Ce qui fut dit fut fait mais, malgré leurs intenses recherches la fée demeura invisible. Alors, la licorne, sage parmi les sages, convoqua, un soir de pleine lune, toutes les licornes, les fées, les lutins, les elfes, les gnomes, de la forêt et même un chamane qui passait par là. Et, aidés par les esprits de la terre, de l’eau, du vent, du feu et des êtres de lumière ils/elles plongèrent dans une méditation profonde pour retrouver au moins le corps de la fée et espéraient-ils/elles, son esprit.

Toute la nuit, elles/ils aidèrent de leurs prières les esprits partis à sa recherche. Ils/elles chantaient, dansaient, tourbillonnaient avec le vent, plongeaient dans les rivières, reliaient les arbres et écoutaient leur voix signalant les indices de sa présence dans les chemins et les grottes enfouies sous la terre. Le son des tambours se répercutaient sur les falaises, sur les rochers. Les bols tibétains envoyaient leur musique cristalline dans les airs. La licorne, son amie, lui parlait par-delà l’espace et le temps. Pendant des heures la forêt ne fut plus qu’un gigantesque feu d’énergie.

Puis, elle se replia sur elle-même. D’un geste de la licorne, chacun resta immobile et silencieux. Les tambours se turent. Un gnome l’avait contactée. Il avait retrouvé une trace sous la terre, dans une grotte. La petite fée était enfin retrouvée. Dans quel état ? Ils/elles allaient enfin le savoir.

Pour ne pas l’effrayer, ils/elles avaient décidé que seule la licorne irait à sa rencontre avec l’aide du gnome. Elle le suivit. La lune éclairait son chemin. Arrivés au bord d’une falaise, il lui indiqua une fente minuscule qui barrait le rocher.  Mais, comment pourrait-elle entrer ? Le temps de se poser la question et elle était déjà à l’intérieur. Elle était devenue aussi petite que la fée.

Le gnome, illuminé de l’intérieur, éclairait le chemin. Il la conduisit à travers des dédales de couloirs et de carrefours, de montées et de descentes abruptes. Une source, un trou tout là-haut dans la falaise qui laissait passer la lumière de la lune et juste en dessous une minuscule cabane de terre plongée dans le noir. Aucun mouvement, aucune lumière, le silence absolu.

La licorne avait le cœur serré. Comment pouvait-on vivre ici. Mais le gnome lui avait dit avoir ressenti de l’énergie de vie, faible, mais présente.

Elle frappa doucement à la porte. Mais n’eut aucune réponse. Alors, elle s’assit dans l’entrée et se mit en liaison avec elle par l’esprit. Elle sentait une telle tristesse. L’innocence, la gaité, tout ce qui avait fait ce petit être avait disparu. Elle l’appela.

  • Petite fée c’est moi, ton amie la licorne. Je viens te chercher. Tu me manques. Tu manques à tous tes amis-es de la grande prairie. Tu n’as plus rien à craindre. L’ogre est mort.

A travers la porte, elle entendit des sanglots.

  • Je ne peux pas revenir. Je suis si laide, si honteuse, et si fatiguée. Je ne peux plus rien donner. Je n’ai plus que de la tristesse en moi.
  • Nous t’aiderons. Mes amies et tous les êtres de la forêt sont prêts à t’accueillir. Nous ferons à nouveau une assemblée comme nous l’avons faite pour te retrouver et cette fois, tes amis-es de la grande prairie se joindrons à nous.  Nous t’aiderons à retrouver ton innocence et ta joie.
  • Je ne suis pas prête. Ce n’est pas possible.

Sur ces entrefaites, le gnome qui savait la difficulté qu’il y aurait à persuader la fée à sortir de sa cabane, était retourné à la grande prairie. Il avait ramené des délégués sous la forme de volutes de fleurs et de tableaux de guérison ainsi que des petits animaux tout doux pour la soulager ainsi que son petit ours avec qui elle dormait quand elle était toute petite.

  • Tu devrais sortir. Tu verrais ce qu’ont apporté tes amis-es. C’est beau. J’ai tout arrangé dans l’entrée. Ils ont apporté du miel pour la douceur et des bougies, des quantités de bougies pour ne plus avoir peur du noir. Il y en a jusqu’à l’entrée de la grotte.
  • Et aussi, oh ! comme c’est beau. Les araignées ont refait ta belle tenue de fée : tes rubans multicolores, ta robe de lumière rose, tes socquettes vert émeraude, tes chaussures de bleu profond et ton petit sac à dos vert pomme.
  •  Dès que tu le voudras, tu pourras retrouver la grande prairie, tes amis-es et ton innocence perdue.
  • Nous t’aimons et nous t’attendons.

 

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commentaires
A
J’ai beaucoup aimé la fée, même si ,j’y ai trouvé la souffrance d’une enfance volée ,.j’aime ton écriture « raconté » aussi dans on s’y croirai comme dans « des pieds et des mains «  . J’adoorrre ! <br /> Merci :)))))) <br /> Aline
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